Johan Grimonprez est connu internationalement pour ses vidéos composées de matériel documentaire, de téléchargements, de documents d'archives historiques, de vidéos domestiques, de bribes de films hollywoodiens, d'images d'actualité et de publicité, entre autres. Son travail oscille entre art et cinéma, documentaire, fiction, pratique et théorie. Dans notre monde saturé d'images, Grimonprez propose de nouvelles structures narratives afin de pouvoir continuer à raconter des histoires personnelles. Il révèle et perturbe le rôle que jouent les médias dans la construction de nos histoires personnelles et politiques, de nos peurs et de nos désirs, ainsi que du regard que nous portons sur nous-mêmes et sur le monde. Vu que l'image médiatique dominante ne correspond plus à la réalité politique et à l'état actuel du monde, Grimonprez prend clairement position. Il émet les critiques les plus tranchantes, abolit les frontières et met les questions délicates à l'ordre du jour. Il emploie l'art, la poésie et la beauté comme un acte de résistance politique et critique.
À la Documenta X, Grimonprez perce grâce à ‘dial H-I-S-T-O-R-Y’ (1997), une étude virevoltante des stratégies médiatiques dans laquelle des images télévisées et des vidéos domestiques se fondent en portraits autour du terrorisme. Le film commence par un dialogue dans lequel un écrivain affirme que le terroriste a rendu inutile le rôle social de l'écrivain car celui-ci parvient mieux à exploiter les médias. Sous l'apparence d'une chronique de détournements d'avions, le film dénonce le ‘détournement’ de la réalité par les médias et les dimensions sombres de notre culture, telles que le spectacle médiatique, l'industrie de la peur et l'oubli croissant.
Au début des années '90, Grimonprez et l'artiste Herman Asselberghs créent des archives médiatiques sous forme de vidéothèque. Les visiteurs peuvent y rembobiner et avancer les films, les arrêter, en choisir un autre, etc. Parallèlement à l'essor de YouTube et de Facebook et à la convergence du téléphone, de l'internet, de l'ordinateur et de la télévision en un seul appareil mobile, la vidéothèque de Grimonprez se transforme en un ‘WeTube-o-thèque’, une installation multimédia aux liens innombrables, à travers laquelle le visiteur peut zapper.
Les films de Grimonprez évoluent également. Alors que les films de ses débuts portaient sur le passage du film à la vidéo ou sur le zapping via le câble, ‘Double Take’ (2009) explore la manière dont le basculement continu en ligne entre plusieurs images affecte notre relation à celles-ci. Le film joue avec la fascination d'Hitchcock en matière de changement de personnalité et démêle les mécanismes de création de paranoïa et de peur au sein de notre société. Il représente le double effet de la télévision et du cinéma, du capitalisme et du communisme, de la publicité et de la guerre, dans un monde qui dégénère en ‘info-dystopie’ et en réalité Photoshop.
Le pseudo-documentaire de Grimonprez, 'The Shadow World : Inside the Global Arms Trade' (2016), qui mêle harmonieusement images d'archives et fiction, est un plaidoyer puissant contre un commerce international des armes corrompu qui menace la démocratie aux quatre coins du monde.
