Lucio Fontana est né en Argentine, fils du sculpteur italien Luigi Fontana. En 1927, il s’est rendu en Italie pour y étudier l'art. Dès le début, il a voulu intégrer la matérialité dans l'espace et donner forme au mouvement. Il a été influencé par les futuristes Umberto Boccioni et Giacomo Balla. En 1935, il a rejoint Abstraction-Création, fondée par Georges Vantongerloo dans le but de créer une scène internationale pour l'art abstrait. Au début de la Seconde Guerre mondiale, Fontana est retourné en Argentine. Il a fondé le « Spazialismo » : une perturbation constante de la séparation historique entre peinture et sculpture, combinant les éléments picturaux de la « forme » et de la « couleur » dans un contexte spatial. En 1946, il écrit le premier de ses six manifestes « spatialistes », attaquant l'esthétique, le formalisme et le rationalisme dans l'art et défendant la création instinctive basée sur l'espace, l'énergie, la vitesse et le mouvement - les principes du « Spazialismo ».
Peu après la guerre, de retour en Italie, Fontana a commencé sa série d'œuvres la plus célèbre, « Concetto Spaziale » (concept spatial). Il a percé et perforé des toiles de peinture avec des « buchi » (trous), un rapprochement innovant de la bidimensionnalité à la tridimensionnalité qu'il continuera à affiner. Ses premiers « tagli » (coupes) sont apparus en 1958 : d'abord plusieurs coupes diagonales sur une toile non traitée, puis plus tard une seule coupe nette, appliquée d'un seul coup délibéré et puissant. Le vide noir profond derrière les découpes a renforcé la spatialité des œuvres. Jusqu'à la fin de sa carrière, Fontana a expérimenté avec les dimensions et la forme des découpes et des trous, ainsi qu’avec la couleur et la texture de la toile. Dans sa quête d'élargissement de son vocabulaire, il ajoute des matériaux inhabituels à ses tableaux, tels que des paillettes d'aluminium et des éclats de verre. Dans la série « Natura », il a appliqué la découpe non pas sur des toiles mais sur des sculptures en bronze convexes.
Des voyages à Venise et à New York au début des années 1960 ont revigoré le travail de Fontana. Il remplace la toile par du cuivre ou de l'aluminium, ce qui a donné lieu à des œuvres humoristiques, parfois presque kitsch. La série « Concetto Spaziale, Teatrino » - des toiles dont le cadre laqué ajoute une troisième dimension - semble influencée par les débuts du pop art de Jasper Johns et Robert Rauschenberg. Fontana n’a eu de cesse de repousser les limites de ses œuvres. Il a donc été l'un des premiers à réaliser des « environnements », dans son cas des espaces remplis de néons, de téléviseurs et de projections de couleurs, entre autres, pour capturer la perception, le son, le mouvement et le temps dans l'espace. Fontana a également collaboré avec des architectes importants, comme Luciano Baldessari, pour qui il a conçu un plafond en néon pour le cinéma dans un pavillon de la Fiera Milano de 1953.
Fontana a ouvert la voie à l'utilisation de la lumière (néon) comme moyen d'expression artistique - pensez à Bruce Nauman, Dan Flavin ou Tracey Emin. Les idées libératrices de son « spatialisme » ont influencé l'art environnemental et l'art de la performance, entre autres. L'impact de Fontana sur l'art du XXe siècle ne peut être sous-estimé : il a été le catalyseur de l'art abstrait italien, l'inspirateur de l'art informel et du mouvement Zero et le précurseur de l'art conceptuel. Mais il a été particulièrement important parce qu'il a libéré la peinture de sa camisole de force bidimensionnelle.
