La manière dont les oeuvres sont disposées dans l’espace lui donnent le sentiment d’être dans une ‘salle de séjour’. On y voit une table, une bibliothèque et une télévision, et des dessins animent les murs.
Blinky Palermo (1943-‘77, Allemagne) est surtout connu pour ses peintures sur textile: des morceaux de textile cousus l’un à l’autre, peints dans une couleur unie et tendus sur un cadre. A l’instar de Sol LeWitt, il a réalisé de grandes installations et des dessins in situ. Ces esquisses sont des études pour des dessins muraux qui explorent la relation entre la forme, la couleur et l’espace environnant. L’art postminimaliste de Palermo sape le modernisme strict et rigoureux avec un humour sophistiqué, de l’expressivité et parfois des titres poétiques.
Stanley Brouwn (1935, Surinam) se sert de son corps comme mesure de toutes choses et il a développé un système de mesure propre (le pied sb, l’aune sb, le pas sb). Dans son projet de traces de pas, il dresse sur des milliers de fiches un inventaire des distances qu’il a parcourues. Exprimées en deux unités: la longueur de son pas personnel et celle de la mesure standard impersonnelle, le ‘mètre’. L’artiste a rassemblé différents matériaux sur cette table, chacun d’une longueur d’1 aune, une ancienne mesure de longueur basée sur la longueur de la partie du bras d’une personne entre le coude et la main.
Le Nesting Bookcase de Joe Scanlan (1961, Etats-Unis) est aussi bien une étagère de planches qu’une sculpture. La simplicité de sa forme évoque l’art minimaliste et conceptuel, mais aussi des meubles ‘do-it-yourself’. Scanlan redéfinit constamment la fonction de cette oeuvre d’art en la présentant dans des contextes différents: du musée à une salle de séjour en passant par une galerie d’art. Ainsi, il explore la manière dont l’oeuvre s’adapte au contexte, en relation avec la réalité et l’activité sociale. Ici, le Nesting Bookcase fonctionne comme une oeuvre d’art dans un musée et comme un élément au sein de l’exposition montée par Ayşe Erkmen sous la forme d’un décor familial.
Dans l’espace situé en face se trouve une sculpture de Henk Visch (1950, Pays-Bas). C’est une maison endommagée dont il ne reste plus que l’ossature. Il n’y a pas de murs pour la protéger et le toit n’est pas couvert. On a disposé de ci, de là des chiffons sur la structure. Cependant, la maison est dorée. La pauvreté et la richesse sont réunies dans cette sculpture. Erkmen interprète cette maison comme une métaphore de la lutte que les artistes livrent avec eux-mêmes et leur entourage.
La base du dessin de Barbara Hepworth (1903-’75) est linéaire comme celle de la sculpture de Henk Visch: des cercles, des demi-cercles, des lignes courbes et droites. Hepworth donne une ‘arty touch’ aux lignes de son oeuvre. Tout comme Visch a cassé les lignes de sa sculpture avec des chiffons, Hepworth a surpeint son dessin de lignes serrées avec une touche de peinture spontanée. Erkmen a fait le choix de Hepworth, entre autres aussi parce qu’à son époque, elle était une des rares sculptrices au milieu d’artistes masculins, tels qu’Henri Moore.
Dans la vidéo de Bruce Nauman (1941, Etats-Unis), on voit un homme et une femme se disputer sans raison. Quelque chose d’insignifiant est à ce point gonflé que cela en devient exagérément important et provoque une bagarre. Pour Erkmen, la vidéo représente le monde de l’art où l’importance des artistes et de leur oeuvre est souvent montée en épingle de manière excessive. Le tissu en plastique de Katharina Heinrich (1964, Autriche) pourrait être une nappe jetée à terre pendant la dispute. Les dessins de David Lamelas (1946, Argentine) décorent la pièce. Erkmen les trouve remarquables de simplicité. En répétant des lignes, l’artiste a fait apparaître deux arbres.
